« RÉPARER L’HISTOIRE » « QUI RÉPARE QUI ? » [1]
MERCREDI 1ER MARS à 18H - AUDITORIUM
« Il faut davantage de statues de personnalités noires ! [2] […]
Faire surgir de l’histoire de nouveaux héros » [3] pour « rééquilibrer le peuple de statues ». [4]
Les mots de l’historienne Jacqueline Lalouette - qui ont été dits et écrits suite aux récents « déboulonnages » de statues et au mouvement « Black Lives Matter » - résonnent avec les récents évènements survenus à Besançon, à la suite de la restauration de la statue de Victor Hugo conçue par le sculpteur Ousmane Sow. Le visage serait devenu trop foncé au goût de certain.e.s ? Au point où 2 jeunes étudiants bisontins en histoire [et ce n’est pas anodin qu’ils soient en histoire], proches des mouvements d’extrême droite ont opté pour un « white facing », accompagné d’une pancarte « White Power ».
Cet évènement est, selon moi, symptomatique des images manquantes du récit national. Un processus de réparation est aujourd’hui à l’œuvre conjointement entre l’ancienne puissance coloniale et ses Français.e.s racisé.e.s. La République française se voit acculée à devoir combler les lacunes de son Histoire - « réparer l’histoire » - pour faire place, hors du cadre qu’elle avait [im]posé à ses Français.e.s, descendants des colonisés et des esclaves, attelés e.lles.ux. à se réparer eux-mêmes - « Qui répare qui ? Nous, nous réparons ! » affirmait Christiane Taubira aux Ateliers de la pensée à Dakar en 2019 en résonance aux mots de Felwine Sarr : « Se guérir, se nommer ». [5] La réparation comme processus vital - en vue d’une montée en humanité - en appelle à la nécessité d’un « je » dans un espace du dire, parce que l’émancipation de tous passe par l’émancipation de chacun.e. Un « je » actant la sortie de cette « salle d’attente imaginaire de l’histoire dans laquelle la pensée européenne avait relégué les colonisés, les privant par là-même du gouvernement de soi » [6] Antoine Perraud nous rappelle que « la décolonialité est un processus de déconstruction qui restaure leur rôle de sujet à celles et ceux que l’Histoire Occidentale avait relégués à ses marges. » [7]
« La décolonisation ne passe jamais inaperçue car elle porte sur l’être, elle transforme des spectateurs écrasés d’inessentialité en acteurs privilégiés, saisis de façon quasi grandiose par le faisceau de l’Histoire. […] La « chose » colonisée devient homme dans le processus même par lequel elle se libère. » [8]
Face au culte des grands hommes, je me tourne vers les archives non-essentielles de nos vies minuscules et c’est depuis cet espace que mon travail émerge […] [9]