Institut Supérieur des Beaux-Arts de Besançon
Résidence // Atsunobu Kohira

DE NOVEMBRE À DÉCEMBRE 2010.
Résidence en partenariat avec le Frac Franche-Comté dans le cadre du programme aiR.
http://www.frac-franche-comte.fr

http://atsunobukohira.wordpress.com

La simplification archétypale chez Atsunobu Kohira doit être comprise comme le choix de laisser la place au sensible pour atteindre la vérité première du corps, ses perceptions. Cet artiste est moins à la recherche d’une nouvelle sensorialité que d’une redécouverte des sens. Son travail ne s’inscrit pas dans un genre particulier. C’est un langage capable de réveiller nos sens, de nous faire voir la mutation d’un univers pris dans le mouvement ininterrompu du temps.

Les prises de vues des ensembles Constellation of Music (2006-2010) et City sounds (2012) sont longues. Tout ce qui se passe pendant et autour de l’appareil photo est ainsi enregistré. Le spectateur ne voit pas distinctement ceci, toutefois ces actions sont entrées comme temps. Il s’agit d’un enregistrement de paysage du temps, d’une dialectique du visible et de l’invisible caractérisant notre appréhension du monde.

Sound glass (2007) propose un autre paysage du temps, cette fois-ci figé par la glace qui crisse. Le temps se laisse voir et entendre s’écouler, bruisser dans sa durée. Nous avons plaisir, en un court instant dilaté, à écouter le temps qui passe. Atsunobu Kohira nous dévoile la beauté de cet espace indéfini où parait se dérouler irréversiblement les existences dans leur changement. Nous installant ainsi dans un espace visuel et sonore.

Les photographies de Constellation of Music donnent à voir une composition sonore, à l’entendre par l’image. Le son détient une place importante dans le travail d’Atsunobu. En apportant une touche de dérision avec les grelots attachés aux poings américains, Rumbrings No.001 & No.002 (2008). En tant qu’instrument, Instrument for Saint-Louis (2012). Utilisé comme sa condition même, dans Infravoice (2009) où l’oeuvre s’actionne lorsque le spectateur crie dans le tuyau. Comme un moyen d’interpréter les poussières, Triadic composition (2010) et à l’instar de City sounds d’améliorer la visibilité de l’imperceptible. Pour Variations for graphite (2011) ou certaines performances le son est seul décideur de la composition du dessin en graphite.

Le graphite est une matière qu’affectionne particulièrement Atsunobu. Ce choix n’est pas sans rapport avec son intérêt pour la nature, la composition moléculaire, la géométrie, la pensée de la matière. Atsunobu, pour Graphite sculpture 1.0 (2011), s’inspire librement de la structure de ce minéral faite d’un empilement de plans, chacun constitué d’un pavage régulier d’hexagones en nid d’abeilles. Ce minéral est utilisé depuis des siècles pour l’écriture, à l’instar de l’encre de Chine que l’artiste, pour City sounds, répand sur ses photos et qui, avant de s’immobiliser, se déplace dans une chorégraphie due à la diffusion du son enregistré au moment de la prise de vue.
Si Atsunobu Kohira choisi le graphite c’est non seulement parce que c’est un matériau traditionnel du monde de l’art chargé d’histoire mais aussi parce qu’il est exploité pour des technologies de pointe en médecine et en industrie. De plus en plus attiré par les mondes microscopiques révélés par la science et la technologie Atsunobu Kohira se sert des progrès dans ces domaines au profit d’un lien plus étroit entre l’homme et la nature. Par cette recherche et ce souci envers l’écosystème il s’inscrit dans l’actualité. Triadic composition est une architecture utopique, polysensorielle dans laquelle on doit s’enfermer pour voir et écouter des poussières, espace restreint où nous parcourons des dimensions aux espaces infinis. Cette boîte, dont la couleur noire laquée rappelle celle des pianos, serait-elle un choix de créer un lieu d’isolement ou un objet de monstration aux proportions importantes pour être en interaction avec un monde microscopique ? Et ne serait-elle pas plus une sculpture qu’un habitacle ?

Les questions du faire, du savoir et de la transmission sont évoquées avec Instrument for Saint-Louis, attestant du lien intrinsèque entre la technologie et l’artisanat (Art and Craft) à l’instar de l’intérêt de l’artiste pour le graphite. Il est souvent question, en effet, du geste en tant qu’acte chez Atsunobu : geste de peintre (proche des réflexions des peintres zen japonais, de Jackson Pollock…), geste de musicien, geste de captation, geste d’artiste du XXIème siècle en lien avec son temps et le passé et surtout geste de sculpteur dans la continuité des réflexions de Guiseppe Penone. L’enregistrement de paysages du temps, l’utilisation du son, la mise en évidence de la pensée de la matière sont avant tout des actes de sculpteur.

Leïla Simon est la commissaire d’exposition indépendante et co-organise les évènements à l’Espace d’art contemporain Les Roches.

Le Frac Franche-Comté est l’un des acteurs du programme de résidences d’artistes aiR/Nord-Est. Ce programme a été initié en 2004 par les Frac du Grand Est. Il est actuellement mené par le Frac Franche-Comté, la Kunsthalle de Mulhouse, le Frac Champagne-Ardenne, le Frac Lorraine, le Frac Nord-Pas de Calais et Be-Part, plate-forme pour l’art contemporain en Belgique.

Chaque année, 5 artistes sont sélectionnés et invités en résidence pendant 2 mois sur un territoire voisin. Les modalités de chaque résidence sont définies en fonction du projet de l’artiste accueilli.

Ces périodes permettent aux artistes de faire le point sur leurs travaux, d’approfondir une recherche, de lancer un nouveau projet, mais aussi de rencontrer de nouveaux acteurs de la scène artistique et de se confronter à différents publics.


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